Plateformes de mise en relation : les risques liés à l’emploi d’auto-entrepreneur

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Depuis quelques années, le nombre d’auto-entrepreneurs a explosé en France. La simplicité de création et les avantages de ce statut contribuent à vouloir se lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat. Mais une fois en route, la problématique majeure est de trouver des missions. Alors, pour faciliter cette recherche, des plateformes de mise en relation ont vu le jour. Cela n’est pas sans risques pour les travailleurs indépendants, mais aussi pour les entreprises qui font appel à eux. Découvrons, dans cet article, tous les dangers liés à l’emploi d’auto-entrepreneurs.

Emploi d’auto-entrepreneurs, de quoi on parle ?

Avec l’essor des statuts d’auto-entrepreneurs, de nouvelles formes d’aide au démarchage voient le jour. Des plateformes de mise en relation permettent ainsi aux professionnels à leur compte de trouver des missions ponctuelles.

Auto-entrepreneur et salarié : la confusion

Le débat qui nous anime aujourd’hui fait référence à l’emploi des auto-entrepreneurs par des entreprises qui décident de passer par des plateformes de mise en relation. Nous parlons bien ici de « mise en relation » et non de « recrutement », car l’auto-entrepreneur n’est pas un salarié. Il est chef de sa propre entreprise, et exerce une activité professionnelle indépendante. Comme toutes les entreprises françaises, les auto-entreprises sont soumises au paiement de charges sociales (proportionnelles au chiffre d’affaires).

Le concept des plateformes de mise en relation

Pour faciliter la recherche de missions pour les autoentrepreneurs, et la recherche de professionnels pour les entreprises, des plateformes de mises en relation voient le jour. C’est le cas, dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, de la plateforme BRIGAD. Pour les métiers digitaux, la plateforme MALT propose également ce type de services.

L’objectif est de permettre aux entreprises de poster leurs offres de mission en ligne ou de rechercher un professionnel parmi un large vivier de profils. Les auto-entrepreneurs sont alors libres de postuler ou de répondre favorablement, ou non, aux offres.

Un risque élevé d’abus

Ce type de plateformes offre de nouvelles formes d’intermédiation qui ne sont pas sans risques pour les auto-entrepreneurs. En effet, ces sites de mise en relation ne doivent pas être confondus avec les entreprises de travail temporaire, dont le but est de mettre en relation des entreprises utilisatrices et des intérimaires. Il ne faut pas non plus confondre l’emploi d’un auto-entrepreneur avec le salariat traditionnel. La frontière est mince entre ces différentes entités, et le risque de salariat déguisé est élevé.

Les avantages de travailler comme auto-entrepreneurs

Pendant très longtemps, l’intérim était un statut bien plus répandu que le freelance. En 2024, le nombre de créations de micro-entreprise n’a jamais été aussi élevé, et cela s’explique par les nombreux avantages qu’offre ce statut.

La rémunération d’une auto-entreprise

Le premier gros avantage du statut d’auto-entrepreneur, c’est la rémunération. Le professionnel est totalement libre de fixer ses tarifs, contrairement au salarié qui perçoit un salaire fixe. Les freelances ont alors la possibilité de déterminer leur rémunération en fonction du type de mission, de sa complexité, ou encore du niveau de compétences requis.

Cette grande autonomie permet alors de potentiellement augmenter ses revenus, soit en fixant des tarifs élevés pour une clientèle ciblée, soit en travaillant pour plusieurs clients en même temps.

Par ailleurs, la micro-entreprise est le type d’entreprise le plus avantageux fiscalement. Un auto-entrepreneur doit simplement s’acquitter des charges URSSAF (calculées en fonction du chiffre d’affaires), et éventuellement de la TVA et de la CFE (s’il dépasse les plafonds d’exonération).

Attention ! Si le travailleur indépendant profite d’une meilleure rémunération, sa protection sociale est très limitée.

La liberté du travailleur indépendant

Ce qui séduit beaucoup de professionnel dans l’auto-entrepreneuriat, c’est la liberté de travailler à la carte. Au-delà du fait que la personne soit libre de choisir ses horaires et ses jours de travail, elle est aussi la seule décisionnaire des missions et des projets sur lesquels elle souhaite s’investir. Cette flexibilité contribue grandement à l’épanouissement professionnel, mais aussi à l’équilibre vie professionnelle et vie privée.

La liberté se traduit également par le fait de pouvoir explorer de nouvelles opportunités, sans jamais devoir se limiter à une fiche de poste définie en amont pour un responsable RH. Les possibilités de développer de nouvelles compétences sont presque infinies.

Le statut d’auto-entrepreneur présente de réels atouts. Mais c’est aussi une aventure professionnelle qui demande de gros efforts, de la persévérance, et quelques concessions, notamment en termes de couverture sociale.

Les avantages de l’emploi d’auto-entrepreneur pour le client

Du côté des entreprises, avoir recours à un auto-entrepreneur peut également présenter de gros avantages.

Des coûts salariaux réduits

L’emploi d’un salarié, que ce soit en CDD ou en CDI, demande de supporter de lourdes charges. Entre le salaire, les retenues salariales et les charges patronales, le coût d’un recrutement de salarié est élevé. Et c’est sans parler du temps passé durant le processus administratif.

Faire appel à un auto-entrepreneur permet de se décharger de ces contraintes financières. En effet, le freelance est payé à la mission ou à l’heure, et le chef d’entreprise doit simplement s’acquitter de la facture finale (comprenant éventuellement la TVA). Cette opportunité permet de mieux contrôler les dépenses, mais aussi d’adapter les coûts en fonction des besoins de l’entreprise. Pour des missions courtes et ponctuelles, l’emploi d’auto-entrepreneur est souvent la meilleure solution.

Une réponse rapide à une situation urgente

L’autre très gros avantage de l’emploi d’auto-entrepreneurs pour les entreprises, c’est de pouvoir profiter rapidement des services d’un professionnel expérimenté. En effet, les travailleurs indépendants permettent de répondre à des besoins urgents ou temporaires, sans passer par la case « recrutement » souvent laborieuse. Pouvoir profiter d’une solution rapide et flexible est un gros avantage pour faire face à un pic d’activité, ou pour réaliser un projet ponctuel avec un professionnel réactif et habitué à s’adapter rapidement aux contraintes et exigences d’une entreprise.

Les avantages financiers pour les plateformes de mise en relation

Les plateformes numériques qui mettent en relation les entreprises et les auto-entrepreneurs sont de véritables opportunités pour tous les professionnels concernés. Mais elles offrent aussi de gros avantages financiers à leurs créateurs et leurs gestionnaires.

Une situation fiscale avantageuse

La plateforme numérique est un projet professionnel très avantageux. En se basant sur des modèles existants, comme les agences d’intérim, les propriétaires de plateformes de mise en relation optimisent les coûts en digitalisant la totalité de l’activité.

En mettant en relation des auto-entrepreneurs et des entreprises, ces plateformes n’embauchent pas de professionnels, mais récupèrent une commission sur chaque mission validée. Elles réduisent alors considérablement les charges sociales et fiscales, tout en bénéficiant de certaines exonérations et aides destinées à encourager l’entrepreneuriat. Cela contribue à la rentabilité et à la flexibilité du modèle économique.

Moins de coûts de structure

À l’instar des agences d’intérim digitales, les plateformes de mise en relation réduisent leurs coûts de structure. En effet, elles n’ont pas besoin de locaux, de matériel ou de ressources humaines pour gérer les auto-entrepreneurs. Tout est automatisé, et la plateforme n’intervient pas dans la relation entre le freelance et l’entreprise.

Cette optimisation des coûts est sans conteste un avantage compétitif, et plus particulièrement pour les entreprises qui recherchent ponctuellement des professionnels expérimentés.

Emploi d’auto-entrepreneur : quels sont les risques ?

L’emploi d’un auto-entrepreneur est relativement simple, et plutôt avantageux. Mais le recours à ce type de professionnels doit respecter certaines obligations, au risque de franchir les limites entre salariat et auto-entrepreneuriat.

Le salariat déguisé et la requalification des contrats

Par définition, un travailleur indépendant n’est pas un salarié. Il est le chef de son entreprise, et la personne qui a recours à ses services a le statut de client. C’est donc à lui d’imposer ses conditions, et non l’inverse. Pourtant, la limite est parfois difficile à percevoir.

Définition du salariat déguisé

Une entreprise qui emploie un auto-entrepreneur en lui imposant des conditions de travail similaires à celle d’un salarié est coupable de salariat déguisé. En effet, c’est à l’auto-entrepreneur d’imposer ses conditions de travail à son client, et aucun lien de subordination ne doit être établi. Si une entreprise impose au freelance des horaires fixes, une dépendance économique, ou encore des directives précises, nous sommes dans un cas de salariat déguisé. Cette pratique suppose que l’entreprise profite des avantages de l’emploi d’un auto-entrepreneur tout en lui imposant les contraintes du salariat.

Mais le freelance doit aussi être vigilant. De son côté, il doit s’engager à respecter les conditions de l’auto-entrepreneuriat. Il peut être rassurant et confortable d’avoir un seul client qui rémunère bien et offre un emploi récurrent. Mais cela s’assimile à du salariat. Le travailleur indépendant ne doit pas dépendre économiquement d’un seul client, au risque de requalifier son contrat en CDD ou CDI.

Les conséquences légales et financières pour les entreprises

Juridiquement parlant, le salariat déguisé peut être considéré comme du travail dissimulé. Cela peut se traduire par deux sanctions, pour l’entreprise.

  • La requalification du contrat de travail : l’entreprise est contrainte de payer des salaires, des congés payés, et toutes les charges qui vont avec ;
  • Les sanctions pénales : jusqu’à 5 ans de prison et 225 000 euros d’amende.

Du côté de l’auto-entrepreneur, il ne s’expose à aucune sanction pénale ou civile. En revanche, en cas de requalification du contrat, il peut être amené à rembourser les aides perçues (allocation chômage, RSA, CAF…).

Bon à savoir : l’auto-entrepreneur a le droit de refuser la requalification de son contrat.

Critères de requalification et exemples jurisprudentiels

Dans certains cas de salariat dissimulé, la requalification du contrat de travail peut être imposée par le Code du travail. Cette décision s’appuie sur 4 critères :

  • L’absence d’autonomie dans la manière d’organiser son travail ;
  • Les contrôles réguliers de l’entreprise et le fait d’imposer des directives ;
  • La fourniture d’outils de travail et de matériel par l’entreprise ;
  • La rémunération fixe et régulière.

Avec l’explosion des créations de micro-entreprises, plusieurs exemples de jurisprudences permettent de mieux comprendre les limites entre auto-entrepreneuriat et salariat. On peut reprendre l’exemple de l’enseigne Monoprix et de la plateforme de mise en relation StaffMe, qui ont été condamnées pour travail dissimulé après avoir eu recours de manière abusive à un autoentrepreneur. Dans la même idée, un chauffeur VTC avait obtenu la requalification de son contrat en CDI en raison de la dépendance économique et de la subordination exercée par l’entreprise de VTC qui avait recours à ses services.

La concurrence déloyale

L’autre risque de l’emploi d’auto-entrepreneur, c’est l’ubérisation du travail. Autrement dit, l’usage massif de freelances par des plateformes numériques pour des courtes missions. Cela représente un risque, car la grande flexibilité met rapidement le doigt sur la concurrence vis-à-vis du marché du travail traditionnel.

Cet emploi massif de travailleurs indépendants pose réellement question face aux entreprises qui respectent les régulations du travail salarié. Ces dernières, qui emploient des salariés en CDD ou en CDI, sont sous pression face aux entreprises qui ont recours à des freelances qui coûtent moins cher. Car, qui dit « coûts plus bas », dit « prix plus bas » pour la clientèle, et cela conduit donc à une concurrence déloyale.

L’ubérisation des intérimaires : les dangers des agences digitales

Le déploiement des plateformes de mise en relation professionnelle apporte aussi des déviances et des dangers du côté des intérimaires. L’ubérisation des travailleurs temporaires peut notamment accentuer la précarité des contrats.

Agences digitales : le manque d’accompagnement et de suivi

L’agence d’intérim digitale fait partie des grandes nouveautés numériques de ces dernières années. Si cela peut représenter une avancée majeure dans la recherche d’emploi des travailleurs temporaires, la digitalisation des agences d’intérim représente aussi un pas immense vers l’ubérisation des intérimaires. Tout l’intérêt des entreprises de travail temporaire est alors perdu.

En agence, l’intérimaire a l’avantage de profiter d’un accompagnement entièrement personnalisé. Le personnel de l’agence d’intérim apprend à connaître le profil de la personne, à reconnaître ses compétences, ses atouts et ses faiblesses, pour le diriger vers l’offre de mission la plus adaptée. En parallèle, l’agence a un vrai contact avec l’entreprise utilisatrice, afin de comprendre au mieux les attentes et les contraintes. La mise en relation est efficace et assure à tout le monde une relation professionnelle de qualité.

En choisissant eux-mêmes leurs missions sur une plateforme numérique, les intérimaires prennent le risque de tomber sur des missions qui ne leur correspondent pas. De leur côté, les entreprises s’engagent à recruter des personnes qui n’auront peut-être pas le profil recherché.

Des conditions de travail précaires

Le travail en intérim est déjà considéré comme un statut précaire. L’uberisation ne pourra qu’accentuer la situation, en détériorant les conditions de travail des intérimaires. Sans un contrat de travail stable, et sans l’appui et l’accompagnement d’une agence d’intérim physique, les professionnels peuvent se mettre en difficulté. Il peut alors être plus difficile de trouver des missions, et d’être contraint d’accepter des offres aux conditions précaires. En effet, la situation d’un intérimaire dépend uniquement de la régularité de ses missions. Or, sans accompagnement ni recommandations, trouver des missions peut devenir compliqué, ce qui peut engendrer une insécurité financière constante.

Une dépendance économique vis-à-vis des plateformes

Le dernier danger de l’uberisation des intérimaires, c’est le risque de ne dépendre que d’une seule plateforme, et de ne jamais pouvoir évoluer. Cette position de subordination limite les possibilités d’évoluer ou de gagner plus d’argent. En agence physique, les responsables d’agence proposent des formations et fournissent des conseils précieux pour améliorer ses compétences. Par ailleurs, ils sont toujours disponibles pour dénicher les offres de mission les plus avantageuses possibles, en rappelant aux entreprises utilisatrices les lois en termes de rémunération des intérimaires.

L’emploi d’auto-entrepreneurs est généralement très avantageux pour le travailleur, pour le client, mais aussi pour la plateforme de mise en relation. Il faut toutefois rester vigilant, et ne pas franchir les limites du salariat. Du côté de l’intérim, les professionnels doivent aussi respecter les conditions de ce type de contrat. Chez Adaptel, votre agence d’intérim spécialisée en hôtellerie-restauration, nous proposons un suivi et un accompagnement entièrement personnalisé, afin de vous assurer les meilleures offres de mission dans les meilleures conditions de travail.